Propulseur aérobie

L’Agence Spatiale Européenne a publié sur son site le 5 mars dernier un article intitulé : « World first firing of air breathing electric thruster« . Il s’agit d’une brève description d’essais d’un propulseur électrique pour satellites fonctionnant avec de l’air comme carburant, c’est à dire d’un propulseur aérobie.

L’objectif est d’utiliser le gaz ambiant comme carburant pour limiter, voire annuler, la masse de carburant embarquée. Les propulseurs de Hall et les moteurs ioniques à grilles couramment employés sur les satellites géostationnaires fonctionnent avec du xénon, un gaz rare onéreux. En remplaçant le xénon par de l’air, on réduirait fortement la masse totale du satellite, ce qui se traduirait par une baisse significative du coût. On comprend donc l’intérêt de tels travaux.
Le journaliste Rémy Decourt, du magazine en ligne Futura Sciences, a publié récemment un article sur les propulseurs aérobies, auquel j’ai participé : « Ce moteur ionique étonnant carbure à l’atmosphère ».

Un tel propulseur ne peut fonctionner correctement qu’à une altitude relativement faible, autour de 150 km, car la densité de l’air diminue lorsque l’altitude augmente. Mais même à cette altitude, l’ensemble propulsif doit être équipé d’un collecteur ayant un diamètre relativement grand, générant donc une force de traînée supplémentaire, et d’un système de compression du gaz avant son injection dans la chambre à décharge plasma du propulseur. Un propulseur aérobie est donc un propulseur plus complexe, plus lourd et plus encombrant qu’un propulseur classique opérant avec du xénon.
Néanmoins, l’option aérobie est sans doute intéressante pour certaines missions à basse altitude car la durée n’est alors plus limitée par la quantité de carburant embarquée. Je pense en particulier à des missions scientifiques telles que GOCE.

Il y a déjà eu de nombreuses recherches dans le passé sur des propulseurs aérobies basés sur des PH, MIG, PPT et arcjets. On a par exemple étudié dans mon équipe les performances d’un propulseur de Hall fonctionnant avec de l’azote (N2). Les travaux dans leur ensemble montrent que les performances en termes de poussée et rendement sont relativement faibles, bien inférieures à celles obtenues avec du xénon. Cette détérioration a deux origines principales : i) l’énergie d’ionisation de N2, O2 et O est élevée et ii) de part leur faible masse ces composés ont un temps de résidence dans le propulseur relativement court. Mais la baisse du rendement, point négatif, peut largement être compensée par le gain lié à l’emploi d’un carburant  » externe « . Pour les PH et MIG, il faut aussi résoudre le problème de la cathode et du neutraliseur qui fonctionnent actuellement avec un plasma de xénon et dont les matériaux sont sensibles à l’oxygène.

On peut bien sûr imaginer d’autres carburants pour d’autres missions. La société américaine BUSEK développe par exemple un concept similaire mais pour l’exploration de la planète Mars dont l’atmosphère est composée majoritairement de CO2.

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