Temps mort

Je n’ai pas été très actif sur ce blog depuis plusieurs semaines. Il y a avait pourtant de nombreux sujets à commenter et à débattre comme la réforme des retraites en France, la guerre en Ukraine, les faillites boursières aux Etats-Unis, les procès de l’ancien président Donald Trump, l’IA et bien d’autres. Mais j’ai été très accaparé par la gestion du laboratoire ICARE du CNRS dont j’ai pris la co-direction depuis le 1er janvier de cette année. Je découvre le métier de directeur d’une unité de recherche. Il y a des bons et des mauvais côtés, des moments faciles et d’autres plus difficiles. La tâche reste cependant prenante et fort intéressante d’autant plus que les défis à relever pour l’avenir du laboratoire sont nombreux et complexes (pyramide des âges, développement durable, contexte international, grands enjeux) sachant que l’on ne maîtrise pas tout, loin de là, et que l’on doit composer avec la politique de site, de la Région, du CNRS et celle du Ministère. Un fascinant jeu d’équilibre. Malgré cette nouvelle fonction, je n’ai pas arrêté de faire de la recherche. C’est impossible. J’ai diminué l’allure mais les travaux se poursuivent au sein de ma formidable équipe sur les propulseurs Hall, les moteurs à carburant solide, les nouveaux ergols et l’utilisation de l’apprentissage automatique (machine learning) en propulsion ionique entre autres.
De surcroît je me suis marié au mois d’avril dernier. Une belle et émouvante cérémonie en présence de notre fils Paco et une formidable et inoubliable journée de célébration en famille. Je ne regrette rien après vingt-quatre années d’hésitation.

Dialogue avec ChatGPT à propos de PE

Vous avez tous entendu parler ces derniers jours de ChatGPT, un agent conversationnel basé sur l’IA développé par OpenAI. Difficile de passer à côté du programme qui fait vos devoirs et rédige vos dissertations, rapports, articles et livres (ou presque). Les étudiants sont ravis. Les autres s’interrogent. Le début de la fin ?
J’ai donc voulu me faire une idée des capacités de ChatGPT. Afin de pouvoir juger de façon professionnelle et objective, j’ai choisi de poser à ChatGPT des questions concernant la propulsion électrique pour les satellites, l’un des domaines que je maîtrise le mieux. Notre petite conversation, sous forme de questions-réponses est disponible ici (en anglais) : A chat with ChatGPT about EP.

Le résultat est je dois dire assez bluffant. C’est en effet un niveau au dessus de ce que fait Google aujourd’hui ou Wikipedia. Il y a des répétitions, des imprécisions (notamment sur les familles et technologies il y a confusion et répétition), des simplifications, des oublis mais je n’ai pas trouvé d’erreurs majeures. C’est en somme une introduction d’un niveau correcte qui donne les grandes lignes. Mais on s’arrête là.
Pour en savoir d’avantage, approfondir, il faut (encore, mais pour combien de temps) se plonger dans les articles et les livres. Il faut aussi être critique, donc avoir du recul, donc avoir des connaissances, du savoir.
Une dernière remarque. ChatGPT ne cite pas ses sources. Il n’y a aucune références. Un point faible que le programme devra corriger.
Pour résumer, un outil sans doute puissant à manipuler avec précaution.

Ravage

Je viens de relire ce livre de René Barjavel. Lu lorsque j’étais un adolescent. J’avais gardé en tête une grande catastrophe, la fin de l’électricité, Paris en feu, la vengeance de notre Terre. Mais j’avais oublié le grand voyage, la survie, la reconstruction.

Ce livre a été écrit en 1942. Quelle anticipation remarquable. Le monde que décrit l’auteur avant le cataclysme ressemble fortement à celui dans lequel ma famille vit aujourd’hui. La technologie et l’argent dominent. Notre environnement se détériore rapidement. Les inégalités se creusent. Nos sociétés n’ont jamais été aussi fragiles, aussi prêt du précipice. Saurons-nous éviter l’abominable chute ? Tombera, tombera pas ?

Il faut relire Ravage comme je viens de le faire et remercier Barjavel pour ses mots et ses scènes. Qui aurait envie de vivre ça ? Personne.

Alors changeons tant que nous pouvons encore éviter le pire.

Weekend à San Sebastian

Daho chantait weekend à Rome il y a quarante ans. Il aurait pu choisir San Sebastian en Espagne même si Rome est une ville délicieuse où il fait bon flâner. Je viens de passer trois jours avec des amis dans cette ville du Pays Basque espagnol célèbre entre autres pour les plages pittoresques de la Concha et d’Ondarreta. En plus de se promener sur le bord de mer, nous avons visité la vielle ville et surtout profiter de nuit de ses innombrables bars à pinxtos, tous plus bons les uns que les autres.
Visite de Bilbao samedi et du célèbre musée Guggenheim d’art moderne et contemporain à l’architecture si troublante. J’ai été émerveillé par l’exposition « La Matière du Temps » avec les oeuvres magistrales de l’artiste Richard Serra qui déforment notre rapport à l’espace et au temps. A voir. Retour paisible par les petites routes côtières à profiter de la mer et de la montagne.
Matinée du dimanche passée à Biarritz puis à Anglet où nous avons vu la grotte de la chambre d’Amour après avoir débattu longuement non pas sur la légende qui l’accompagne mais sur sa localisation exacte. Ciel bleu, soleil et surfeurs. Un peu d’évasion. Déjeuner au bord de la plage avec vu sur la mer et la côte en profitant de la magie du lieu et d’une douce chaleur. Pas vraiment envie de renter. Retour vers Paris par le TGV. Quatre heures à refaire le weekend et imaginer le prochain.
Ce fût un weekend EP entre amis, agréable comme tous les autres avec ses moments de partage, de réflexion, d’évasion et de palabres autour de bons vins et de mets délicieux. Il y a vingt ans nous refaisions le monde en imaginant nos vies futures. Mais le temps s’est écoulé. Aujourd’hui je note que l’inquiétude grandie quant à l’avenir de nos sociétés et du monde tel que nous le connaissons. Parce que nos enfants grandissent et s’apprêtent à voler de leur propres ailes ? Parce que la guerre en Europe ? Parce que le climat évolue bien trop vite et que les ressources s’épuisent ? Ou bien simplement parce qu’on vieillit ?

Zombie

Z. Dernière lettre de l’alphabet. Troisième lettre de mon nom. Le signe du justicier masqué Zorro. La lettre peinte sur les véhicules russes lors de l’invasion de l’Ukraine en février dernier.

Z comme Zombie. Le livre de Iegor Gran. Lu d’un trait. Je vous invite à faire de même pour mieux comprendre le comportement des fous de guerre russes et l’aliénation du peuple.

Je suis allé en Russie pour des programmes de recherche communs en propulsion électrique dans les années 2000 à de nombreuses reprises. Plus particulièrement à Moscou. Il y a sur ce blog des textes qui parlent de ces voyages. J’ai aimé cette ville et ses habitants. Mais je me suis toujours méfié de Vladimir Poutine et de ses sbires. Les années écoulées m’ont donné raison. Le clan P, fait d’individus tous plus riches les uns que les autres, ont pillé, et continue de piller, le pays, mentit, triché, et entrainé ce grand pays dans une chute vertigineuse que le peuple paiera pendant de nombreuses décennies.
J’ai retrouvé dans le livre de I. Gran ce que je sais, ce que j’avais ressenti. Pour moi les russes n’ont pas affronté leur passé et restent prisonniers dans une bulle où règne la nostalgie d’un pays qui n’a jamais existé, le mensonge, la haine, la désinformation, la violence, le culte de l’homme fort.

Le conflit entre l’Ukraine et la Russie, qui, ne l’oublions pas, a en réalité débuté en 2014, a tragiquement basculé le 24 février 2022 lorsque V. Poutine a lancé une invasion à grande échelle de l’Ukraine. Quelle bêtise du côté russe. Quel aveuglement du côté européen. Poutine nous aura au moins réveillé. Je ne crois pas à une fin proche après neuf mois de conflit, contrairement à BHL. Cette guerre va durer. Elle sera longue et douloureuse, mais je ne doute pas une seconde de l’issue. L’Ukraine reprendra les territoires perdus. Le bloc européen se renforcera. La Russie s’effondrera. Les russes paieront les délires de leurs dirigeants mégalomanes une fois de plus.
J’espère qu’un jour, puisse-t-il être proche, ce peuple se réveillera.

Grillage

Petite pause hier après des semaines longues et chargées.
J’ai posé un jour de congés pour faire une randonnée dans la Sologne, non loin d’Orléans, entre Ardon, Mézières-lez-Cléry et Jouy-le-Potier. 31 kilomètres parcourus avec mon fidèle compagnon Elvis au cœur de la forêt, protégé du soleil et de la chaleur. Cette sortie, attendue depuis longtemps, m’a permis de constater à quel point la Nature souffre des fortes chaleurs actuelles et du manque criant de précipitations. Tout est sec. Les plante sont brûlées et les feuilles jaunissent. Dire que cela n’est qu’un début et que dans une ou deux décennies on atteindra sans doute 50°C à l’ombre par moment au centre de la France. J’espère que cet état jugé anormal mais qui deviendra bientôt la norme conduira à notre réveil et à l’action, au changement de comportement et à la lutte contre la dérive climatique. Mais je reste septique, ce n’est sans doute pas suffisant, pas assez douloureux, faiblement impactant malgré les violents incendies (quasiment tous criminels) et le rationnement en eau. Qu’avons-nous retenu de la leçon  » Covid 19  » ?
J’ai eu le temps de réfléchir à tout cela hier, et a bien d’autres choses tout en profitant des paysages, de l’air frais et de la tranquillité des lieux traversés. J’ai (Nous, mais Elvis était moins réceptif) pu aussi admirer de nombreux animaux évoluer dans leur milieu naturel : sangliers et adorables marcassins, biches et jeunes cerfs en troupeau, lièvres et lapins. Quelles belles images ; quels beaux moments intemporels. Hélas, il me faut ternir cette vision idyllique de la campagne solognote. La moitié au moins des animaux observés était parqués dans de vastes, voire très vastes, réserves privées dédiées à la chasse. La Sologne grillagée, et défigurée. Vous avez du en entendre parler. Je ne suis nullement opposé à la chasse, lorsqu’elle a pour but la régulation et la recherche de nourriture. Quel objectif, quel plaisir, si ce n’est malsain, lorsque l’animal n’a aucune change et lorsque les parties de chasse sont synonyme de carnage ? Le divertissement facile ; l’argent. Tout change. Rien ne change.

Voyages interstellaires

J’ai participé cette semaine à l’école d’été « Second Interstellar Studies Summer Course » organisée par le Limiteless Space Institute (LSI) et l’organisation Initiative for Interstellar Studies (i4is).

J’ai fait un excellent choix même si les journées furent longues puisque les cours et conférences débutaient à 16 heures pour se clôturer à minuit dans mon cas à cause du décalage horaire avec Houston. Je tiens à remercier Rob de i4is et Sonny du LSI pour leur engagement, leur passion et leur énergie mis au service de cette belle initiative qui je l’espère se poursuivra dans le futur.

Vous l’aurez tous compris, il a été question tout au long de cette semaine de voyages interplanétaires (à l’intérieur du système solaire) et surtout de voyages interstellaires (à l’extérieur du système solaire). Les exposés étaient tous passionnants, riches et instructifs. Je tiens à saluer ici le sérieux des intervenants et leur attitude décontractée ; ils ont su sans mal partager leur engouement et transmettre leurs savoirs. Le contenu thématique de l’école était fantastique puisque nous avons traité de propulsion (fission, fusion, voiles laser, warp drive), de ressources in-situ, de l’architecture des vaisseaux (generation ships, world chips mais aussi Chipsats), des voyages et de leurs contraintes, des objectifs et des intérêts (pour vs contre). Nous avons aussi évoqué les voyages interstellaires dans la science-fiction, en particuliers les films et les séries. Un très beau programme, plaisant et instructif même pour un physicien des plasmas spécialiste de la propulsion électrique comme moi.

J’ai surtout retenu une chose de cette école : lorsque l’on traite sérieusement des voyages interplanétaires, il ne faut surtout pas se limiter à partir du moment où l’on ne contredit pas les lois de la Physique. Peu importe l’énergie, la matière, le temps et le coût demandés, un jour viendra où l’humanité sera prête.

Château de Sully sur Loire

Visite de l’exposition photographique « Legacy » de Yann Arthus-Bertrand hier au château de Sully-sur-Loire à une cinquantaine de kilomètres d’Orléans. Le cadre offert par ce château fort, dont la construction débute au XIVème siècle, se prête parfaitement à la découvert et à la réflexion.
Cette exposition rassemble des photographies du célèbre photographe Yann-Arthus Bertrand et présente une biographie qui dévoile la richesse de la vie de cette homme, ses oeuvres et ses combats. L’exposition comprend une centaine de photographies divisées en portraits (touchants et justes), paysages (sublimes pour la plupart) et lieux vu du ciel avec très (trop) souvent la marque de l’être humain. Legacy est aussi le titre d’un film documentaire réalisé par Yann Arthus-Bertrand et diffusé en 2021. Ou comment l’homme moderne, toujours pressé et avide de dollars, impacte le monde et son environnement et pourrait bien laisser comme seul héritage à ses enfants une planète invivable.
Je vous invite à visionner le film et à visiter l’exposition.

IEPC 2022

Me voilà de retour des Etats-Unis. Je viens de passer une semaine à Boston dans le Massachussetts où j’ai assisté à la 37ème édition du congrès International Electric Propulsion Conference organisée par mon collègue et ami le Professeur Paulo Lozano sur le campus du célèbre MIT.
Cette année l’atmosphère était particulière, période post- Covid oblige. L’IEPC aurait du avoir lieu en 2021 après l’édition de Vienne en 2019 mais la pandémie nous a obligé à décaler d’un an. Il y a avait un réel plaisir de se revoir après 3 ans. Retrouvailles en famille en quelque sorte et retour à une certaine normalité. Pendant une semaine nous avons pu passer du temps ensemble, partager nos travaux et nos avancés, discuter du futur de la propulsion électrique et des directions à suivre pour les années à venir.

Une fois encore le congrès fût riche de recherches innovantes, de nouveaux résultats et de nouvelles voies ouvertes par une jeune génération et par les très actives et nombreuses startups. Je retiendrai les avancés sur les PEH à écrantage magnétique, la micropropulsion qui avance à grands pas et quelques présentations surprenantes sur des diagnostics et le couplage diagnostics-simulations numériques.
Quant au dîner de Gala, je n’oublierai pas la vue magnifique sur Boston et son port depuis le 33ème étage d’un superbe gratte-ciel dans la célèbre State Room. Quel spectacle en particulier à la tombée de la nuit lorsque la ville s’illumine.

J’ai aussi profité de cette semaine pour visiter cette ville de Boston si particulière, si différente du reste. Je n’y étais pas retourné depuis 1998 lors de mon tout premier séjour aux USA. La ville n’a pas réellement changé si ce n’est de nombreuses constructions nouvelles mais harmonieuses. L’atmosphère unique est là, toujours là et la magie opère. Voilà une ville américaine où je pourrais vivre tant elle est liée à la vielle Europe.
J’ai aussi assisté, par hasard en fait, à une manifestation géante contre l’abrogation par la court suprême de l’arrêt Roe v. Wade (datant de 1973). Le choix du droit à l’avortement est ainsi redonné par la court majoritairement républicaine à chacun des États. Un retour en arrière, un coup dur pour les femmes et le droit de disposer de leur corps. Le côté sombre des Etats-Unis, une démocratie pilotée par 9 juges nommés à vie. Etrange conception de la liberté et de la démocratie. Le paradoxe américain. Je crains hélas que ce coup d’épée ne soit pas le dernier car la droite ultralibérale, croyante, fanatique et raciste a su tisser sa toile au cours des dernières décennies afin d’imposer sa vision du monde au pays.

Avant de conclure, je tiens à féliciter une fois encore mon ami Alec Gallimore de l’Université du Michigan et Dan Goebel du JPL pour la médaille Stuhlinger qu’ils se sont vu remettre lors de cette 37ème IEPC. C’est de loin mérité car vos contributions respectives à la propulsion sont immenses.
Je souhaite aussi rappeler que j’organiserai avec mes amis L. Garrigues (CNRS) et A. Rossi (CNES) la prochaine édition de l’IEPC. Elle se déroulera dans la ville rose en juin 2024. Nous mettrons tout en oeuvre pour que cette 38ème conférence soit une réussite et une vitrine pour la Propulsion Electrique en France.

La méthode scientifique

J’ai participé hier après-midi pour la troisième fois à l’émission de radio « La Méthode Scientifique » animée par Nicolas Martin et son équipe. Le sujet du jour : la propulsion spatiale du futur. Le premier thème traité fut le concept SpinLaunch, sorte de fronde géante servant à lancer des satellites. Diverses méthodes ont ensuite été abordées, dont les technologies de propulsion électrique et de propulsion nucléaire. Pour finir nous avons discuté des voiles solaires et des voiles laser, illustrées par un reportage au sein de la startup française GAMA.

Si vous voulez en savoir d’avantage sur ces technologies du futur innovantes et prometteuses, vous pouvez écouter tranquillement l’émission ou le podcast : Spin Launch : un p’tit tour et puis s’en va.


Je tiens à remercier Maxime Puteaux (conseiller chez Euroconsult) ainsi que Franck Plouraboué (directeur de recherche CNRS à l’Institut de mécanique des fluides de Toulouse) pour les échanges que nous avons eus et leur commentaires précis et pertinents.