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Prix Nobel de physique

Le prix Nobel de physique 2018 vient d’être attribué à Arthur Ashkin (Amérique), Gérard Mourou (France) et Donna Strickland (Canada) pour leurs travaux sur les lasers et leurs applications.

Il faut se réjouir qu’un français soit lauréat de ce prestigieux prix. Il est le treizième physicien français récompensé depuis la création du prix Nobel en 1901. On lui doit la mise au point d’une technique permettant la génération d’impulsions lumineuses ultra-courtes dont la puissance peut atteindre le péta-watt.
A l’opposé on doit regretter que la canadienne Donna Strickland soit seulement la troisième femme à être reconnue et distinguée.

Gérard Mourou est de la génération de ses prédécesseurs, Serge Haroche, Albert Fert, Claude Cohen-Tannoudji, Georges Charpak, Pierre-Gilles de Gennes. Je vous parle d’un temps… Les travaux de ces grands hommes de science, que le comité Nobel a salués, ont été menés entre les années 1950 et 1980. Une autre époque, celle où la science française rayonnait, où l’enseignement était solide, où les chercheurs ne passaient pas leur temps à courir après les crédits et les subventions, à rédiger des projets qui ne seront jamais financés, à faire des rapports que personne ne lira et à participer à des réunions aussi ennuyeuses que stériles. J’ai eu la chance de connaître la fin de cette époque où un chercheur faisait le métier pour lequel il était payé. Mais c’était il y a déjà bien longtemps.

Je pronostique ici que dans vingt ans il n’y aura plus de prix Nobel français en physique et chimie. Alors il faut savourer celui-ci.

Stephen Hawking

Un brillant physicien vient de nous quitter. Un grand Homme également.
Son intelligence hors-norme, son courage face à la maladie et aux épreuves, son humour tout britannique et ses réflexions philosophiques en ont fait un véritable symbole. Je dirai qu’il était incomparable, ce qui ne fait qu’accentuer le poids de sa disparition.

Sur un plan personnel, S. H. a, inconsciemment bien sûr, joué un rôle dans mon orientation et mon parcours, avec d’autres grands scientifiques tels que Erwin Schrödinger , Roger Penrose (ami de S. H.), Hubert Reeves, Ilya Prigogine, Louise De Broglie, Bertrand Russell…
J’ai découvert Stephen Hawking alors que j’étais un jeune adolescent en lisant Une brève histoire de temps, l’un des plus célèbres et des plus populaires ouvrages sur la physique. J’ai ensuite lu la plupart de ses livres (L’Univers dans une coquille de noix, Sur les épaules des géants, Y a-t-il un grand architecte dans l’univers ? ), certains de ses articles scientifiques et plusieurs textes liés aux nombreuses conférences qu’il a donné à travers le monde tout au long de sa vie.
Ce que j’ai toujours apprécié chez cet homme, en plus de ses travaux scientifiques en cosmologie et en mécanique quantique, c’est sa liberté de penser et ses profondes réflexions sur le Monde et nos sociétés.

Je le rejoins lorsqu’il dit en 2014 que le développement de l’Intelligence Artificielle n’est pas sans risques pour la race humaine. Nos capacités – limitées – ont été forgées par l’évolution sur une très longue période. Elles pourraient être dépassées, ce qui nous rendrait obsolètes, inutiles.

Je partage ses préoccupations face à notre capacité à survivre aux défis majeurs qui sont à nos portes, à savoir le réchauffement climatique, la pollution, la surpopulation. Sans une modification radicale de nos comportements, de notre vision, de nos valeurs, la probabilité est faibe que l’humanité s’en sorte. Alors lorsque j’analyse la situation actuelle aux USA, en Russie, en Chine, en Italie, en Europe de l’est… Je ne me sens pas rassuré quant à notre avenir.

L’Espace est-il la solution ? Le destin de l’Homme est-il cosmique ? Stephen Hawking soutenait le projet Breakthrough Initiatives dédié à la recherche de la vie extraterrestre. Même si je considère le volet Breakthrough Starshot, qui vise à envoyer un très grand nombre de micro-sondes spatiales (propulsées à priori par des voiles solaires) à destination d’Alpha du Centaure, ambitieux mais pertinent, je ne peux me résoudre à croire que les cieux sauveront l’humanité.
Il faudra des décennies, voire des siècles, et des ressources gigantesques pour qu’une infime partie de l’Humanité s’évade, car l’Homme tel qu’il est aujourd’hui n’a pas été conçu pour voyager et vivre dans l’espace mais pour s’épanouir sur la Terre.

Falcon Heavy

Décollage de la fusée Falcon Heavy de Space X depuis Cap Canaveral le 6 février 2018.

Je viens de regarder en direct (21h45 heure de Paris) le lancement de la fusée Falcon Heavy depuis Cape Canaveral sur le site de Space X. Avec ses 27 moteurs Merlin 1D qui lui donnent la capacité de placer 63,8 tonnes de charge utile en orbite basse, Falcon Heavy est aujourd’hui le lanceur le plus puissant en service. Mais il reste néanmoins loin derrière la gigantesque fusée Saturn V.

Waouh ! Extrêmement impressionnant. Une superbe réussite pour l’entreprise d’Elon Musk. Un fait majeur dans l’histoire de l’Homo-Spatialis. Le 6 février 2018 ne sera plus désormais un jour comme les autres. Et que dire de l’atterrissage synchronisé des deux boosters latéraux ! Un moment presque magique. Je vous invite à visionner cette séquence si vous ne l’avez pas vue.

Même si l’étage central n’est pas récupéré (pour l’instant Space X ne donne pas d’information sur l’atterrissage prévu sur la barge en mer), c’est un grand événement qu’il faut célébrer. Un pas de plus vers la conquête du système solaire.
Les images du Tesla Roadster voguant dans l’espace avec Monsieur Starman équipé de sa combinaison spatiale étaient elles aussi à couper le souffle.

Il y a du génie dans tout ça. Il est évident que Space X a encore plusieurs longuers d’avance, mais un tel événement suivit par des millions de personnes ne manquera pas de motiver les concurrents. L’histoire est loin d’être terminée. Tant mieux.

PS : J’ai eu la chance de visiter le complexe de lancement 39 (LC 39) de Cape Canaveral, d’où sont partis Saturn V et la navette spatiale, il y a deux ans et demi. Le pas de tir 39A était alors en cours de réaménagement pour accueillir le lanceur Falcon Heavy.

Spectroscopie laser

J’étais au Col de Porte près de Grenoble il y a une semaine dans le cadre d’un atelier du Réseau des plasmas froids du CNRS.
Cet atelier de 2 jours, organisé par mon ami Nader Sadeghi et moi-même, avait pour sujet principal la spectroscopie lasers appliquée aux décharges plasmas. Les participants ont pu suivre 8 conférences et participer à des travaux pratiques sur l’absorption et la Fluorescence Induite par Laser dans une décharge d’argon magnétisée.
Cette édition comportait également un exposé sur la sécurité liée à l’emploi de lasers et une conférence sur la spectroscopie par rayonnement synchrotron.
Comme toujours les présentations étaient de grande qualité et les échanges ont été nombreux et, je l’espère, utiles et fructueux.

J’ai, en ce qui me concerne, parlé de la mesure de la fonction de distribution en vitesse des atomes et des ions dans les plasmas, en insistant sur la méthode, les artefacts et pièges et l’analyse des profils de raie. Les transparents que j’ai utilisés sont disponibles ici.

Les lecteurs intéressés trouveront l’ensemble des présentations de cet atelier sur le site du RPF.

Somme des entiers positifs

Somme entiers positifs

Somme des entiers positif = -1/12 (Crédit : Elwood H. Smith)

1 + 2 + 3 + 4 + 5 + 6 +… = -1/12

La somme de tous les entiers positifs serait égale à un nombre rationnel, i.e. une fraction, relativement petit (1/12 ≈ 0.083) et négatif en plus. Alors, vrai ou faux ?

C’est faux naturellement. La somme de tous les entiers positifs, ou la somme des entiers naturels, tends vers l’infini, noté +∞ en mathématique. Alors pourquoi avoir écrit une telle égalité en première ligne de cette article ? Et puis pourquoi -1/12 et pas 51, ou 1038 ou -99 ou 6.3952 ou π ou  -\sqrt{31} ou… ?

D’abord pour vous faire réagir, chers lecteurs. Un article traitant de cette somme a été publié sur le site du NewYork Times en février 2014 : In the End, It All Adds Up to – 1/12. Il avait suscité près d’un million et demi de commentaires, ce qui prouve que le sujet et les découvertes déconcertantes qui lui sont liées intéressent et force à l’interrogation. Réjouissons-nous que les mathématiques attirent et fassent réfléchir.

Ensuite, car de très grands mathématiciens tels que Leonhard Euler, Bernhard Rieman et Srinivasa Ramanujan ont travaillé sur cette somme. Cela démontre que le sujet est ancien mais également complexe. On découvre aussi que la manipulation de certains outils et techniques peut conduire à des résultats tout à fait inattendus et déroutants.

Enfin, et c’est sans doute le point le plus important, la réponse à la question posée nécessite des calculs à l’aide de séries et de polynômes et le traitement de quantités infinies ou presque nulle. De tels calculs s’avèrent en fait très utiles en physique, notamment en mécanique quantique et en théorie des champs. On peut citer par exemple la renormalisation. Il s’agit d’une méthode permettant de supprimer les infinis qui apparaissent lors du calcul de certaines observables physiques, comme la masse des particules. Cette approche permet de prédire les résultats expérimentaux avec une excellente précision. Beaucoup de physiciens ont été déroutés par cette technique un peu magique.

Pour en savoir plus sur la somme des entiers naturels, je vous conseille la lecture de l’article de Xavier Buff sur le site Images des Mathématiques. Il existe aussi une multitude d’article sur Internet traitant du sujet.

Physique des Plasmas : Feuille de route 2017

La « feuille de route » pour la physique des plasmas froids, à laquelle j’ai contribué, vient de paraître : The 2017 Plasma Roadmap: Low temperature plasma science and technology, publiée dans le Journal of Physics D: Applied Physics. L’article est disponible dans l’onglet Publications.

Après une première édition parue en 2012, il était nécessaire de réaliser une mise à jour, de proposer une nouvelle perspective à moyen terme car le domaine de la physique des plasmas froids évolue rapidement et devient de plus en plus riche, complexe et interdisciplinaire. Les avancées scientifiques et technologiques du domaine dans lequel je baigne depuis plus de vingt ans ont désormais des répercussions sur de nombreux aspects de la vie quotidienne. Il est aussi acquis que les plasmas vont jouer un rôle important dans la transformation de nos sociétés et dans la réponse aux nombreux défis qui sont devant nous.

L’article couvre 19 champs disciplinaires, ou sous-domaines, et traite de thèmes tels que la conversion d’énergie, les nanomatériaux, la médecine, l’agriculture, l’aérospatial et l’environnement. Il est aussi question de théorie, de simulations numériques et de données à l’échelle atomique et moléculaire car ces champs sont les piliers sur lesquels reposent les découvertes, l’interprétation des expériences et les développements technologiques qui en découlent.

Avec mon collègue Eric Moreau de l’Université de Poitiers, nous avons rédigé le chapitre concernant le secteur de l’aérospatial. Eric s’est concentré sur le contrôle des écoulements, quant à moi j’ai imaginé l’avenir de la propulsion pour les véhicules spatiaux. Il ne s’agit nullement d’une interprétation purement personnelle qui refléterait ma vision et mes souhaits, mais d’une extrapolation objective faite à partir de la lecture de nombreux articles, de discussions avec une multitude d’experts et de la synthèse de plusieurs conférences récentes. J’espère avoir dégagé les grandes lignes de ce que sera la PE demain. On verra en 2022 si j’avais vu juste.

Je tiens à remercier chaleureusement mes collègues Mark Kushner, Uwe Czarnetzki et Peter Bruggeman  pour la confiance témoignée et le difficile travail de coordination et de publication d’un tel article.

Demain, la Terre

Il faut impérativement lire l’article écrit par le journaliste américain David Wallace-Wells publié dans le New York Magazine le 9 juillet dernier. Cet article s’intitule The Uninhabitable Earth. Tout est dans le titre…

Ce qui est décrit dans ces pages n’est hélas pas de la science-fiction, n’en déplaise à tous les sceptiques. David Wallace-Wells dresse le tableau de ce que la Terre et notre civilisation pourraient devenir à la fin du siècle si la modification du climat s’emballe. Ce qui reste tout à fait probable car les mesures prises jusqu’ici n’ont quasiment aucun impact. Et le retrait de l’Amérique des accords de Paris ne va rien arranger. Je ne pense pas que nous arriverons à limiter la hausse de la température moyenne à 2° C. Il est déjà trop tard. Mais seulement quelques degrés de plus et le glas pourrait sonner pour l’humanité, comme le décrit The Uninhabitable Earth.

Cet article a été majoritairement bien accueilli par la communauté scientifique et par le grand public. On peut certes reprocher au journaliste de mettre en avant le scénario du pire – ce que certains on fait ; lire NY Magazine – mais ce qui est dépeint n’en reste pas moins possible, envisageable à quelques décennies d’aujourd’hui.

Allons-nous finir comme ça ? Quel gâchis si tel est le cas, d’autant plus que l’on ne pourra pas dire que l’on se savait pas. Et pourtant… Je fais partie de ceux qui pense qu’il est grand temps d’expliquer aux gens les conséquences de nos actes passés et présents, sans fard, sans discours poli et édulcoré. Oui, il faut faire peur pour faire prendre conscience. Tracer des courbes et donner des chiffres ne suffit pas. Il faut des mots forts, des images marquantes pour démarrer une  » réaction en chaîne  » pour reprendre les mots de David.

Il nous reste peu de temps pour éviter le scénario de la Terre hostile, voire de la Terre inhabitable. Agissons ou nos enfants pourraient compter parmi les derniers habitants de la petite planète bleue.

Une version au format pdf de l’article de D. Wallace-Wells est disponible ici.

Favicon

Le symbol Aleph-Zéro

Je viens – enfin – d’ajouter un Favicon à mot blog. Il s’agit d’une image qui caractérise un site et permet de l’identifier. J’ai naturellement choisi le symbol Aleph Zéro, qui est aussi le nom du site.

Aleph est la première lettre de l’alphabet hébreu et de l’alphabet arabe.
En mathématique, les alephs sont les cardinaux (taille ou nombre d’éléments) des ensembles infinis ordonnés. Aleph-zéro (ℵ0) est par définition le cardinal de l’ensemble des entiers naturels. Il s’agit du plus petit des nombres alephs. Les alephs font partie des nombres transfinis introduit par Georg Cantor. La théorie des ensembles définit une arithmétique des alephs ce qui peut surprendre puisqu’il s’agit d’effectuer des opérations avec des nombres infiniment grands. A bien des égards cette arithmétique diffère totalement de celle liée aux nombres naturels dont nous avons l’habitude. Pensez par exemple à l’équation ℵ0 × n = ℵ0, où n est un nombre naturel non nul. Cette équation se généralise à tous les alephs.

Pourquoi ai-je choisi d’intituler mon blog Aleph-Zéro ?
Parce que ces nombres me fascinent depuis que je les ai découverts en classe de terminale. Notre professeur de mathématiques nous en avait parlé alors que nous travaillions sur les cardinaux en théorie des probabilités. J’ai ensuite lu plusieurs ouvrage qui abordaient le sujet. Ces nombres et les opérations qui leurs sont associées représentent une magnifique construction intellectuelle. Les alephs symbolisent à mes yeux l’inouïe capacité de notre cerveau et le haut degré d’abstraction que notre civilisation peut atteindre. Ces nombres révèlent aussi la beauté des mathématiques.

La méthode scientifique

J’étais l’un des invités hier après-midi de l’émission La Méthode scientifique de France Culture animée par Nicolas Martin. Le sujet du jour : Voyage spatial, vers l’infini et au-delà. Vous pouvez ré-écouter l’émission ici.

Un très bon moment (trop court à mon goût) passé en compagnie de Richard Heidmann, Polytechnicien, ancien ingénieur en propulsion spatiale chez SAFRAN, fondateur et vice-président de l’association Planète Mars. J’espère que les auditeurs auront apprécié et appris.

Astronautique : informations et données

Le lecteur intéressé peut trouver de nombreuses informations et données concernant le domaine de l’Astronautique sur la page personnelle de Gunter Krebs :
Gunter’s Space Page.

Le site est sérieux et les informations sont mises à jour régulièrement.
On y trouve en particulier des données intéressantes et utiles sur les technologies spatiales, les lanceurs les satellites et les missions.

Ce site est à ma connaissance l’une des meilleures références pour les CubeSats, des nano-satellites (1 à 10 kg) dont les dimensions sont normalisées. L’unité de base, le U, est un cube d’un décimètre de côté dont le volume est exactement 1 litre. Le format des CubeSats a été défini en 1999 afin de réduire les coûts de lancement des très petits satellites et démocratiser ainsi l’accès à l’espace. Ce format permet par exemple aux universités de placer en orbite leurs propres satellites. De très nombreux lancements de CubeSats ont déjà été réalisés et le nombre de projets est en croissance exponentielle car la miniaturisation de l’électronique a grandement augmenter les capacités des CubeSats qui peuvent désormais mener des missions complexes et à fort potentiel.

Je recommande aussi la lecture de la La page Wikipedia CubeSat qui contient des information sur l’histoire des Cubesats et leur architecture.