Imposture ?

Je viens de lire ce matin dans le journal Le Figaro un article sur Neil Ibata, un garçon de 15 ans qui vient de co-signer un papier dans la plus prestigieuses revues scientifiques au monde, Nature.
Neil, élève en 1ère S, était en stage dans l’équipe de son père, astrophysicien,  à l’observatoire de Strasbourg. En traitant des données avec un programme qu’il venait d’écrire en langage Python, il a permis à l’équipe de déceler la rotation de galaxies naines autour d’Andromède. Les chercheurs ont alors analysé des mesures prises entre 2008 et 2011 par le télescope Canada-France-Hawaï et confirmé la découverte qui a des implications profondes en astrophysique, par exemple sur la matière noire et l’ordonnancement de l’Univers.

Neil est sans doute un enfant au-dessus du lot. Ils ne sont pas nombreux à son âge à s’intéresser à la physique et à être capable de mettre au point un programme pour visualiser des données astrophysiques. Il faut donc l’encourager et l’aider à poursuivre dans cette voie pour laquelle il a en apparence un don.
Mais que penser du fait que Neil soit l’un des 16 co-auteurs de l’article ?
De mon point de vue, c’est une imposture. Neil a fait ce que de très nombreux jeunes stagiaires font dans les laboratoires : traiter des données, écrire des bouts de programmes, participer à des expériences. Il a donc contribué aux travaux de recherche, comme le font les stagiaires, les techniciens, ingénieurs et l’ensemble du corps administratif en fait. Mais il n’est pas à l’origine de la découverte. De plus je ne crois pas qu’il comprenne les implications des résultats. Neil aurait, à la rigueur, pu être cité dans les remerciements, rubrique classique situé à la fin d’un article et qui permet de faire apparaître le nom de ceux dont la participation est jugée forte.
Néanmoins, je serais assez indulgent sur ce cas là. Je décèle aussi derrière le cas de Neil un père qui a voulu faire plaisir à son fils. Quoi de plus légitime ?

La liste d’auteurs est hélas trop souvent manipulée dans un article scientifique. Il y a de nombreuses raisons à cela, et le fait que l’avancement dans une carrière de chercheur soit fortement dépendante du nombre – et de la qualité – des articles publiés n’arrange rien.
Mais il s’agit d’éthique et de bonne conduite à mes yeux. Pas question donc, dans mon équipe, de gonfler (ou réduire, car le cas d’auteurs légitimes supprimés existe aussi) la liste des auteurs. Apparaissent ceux qui ont très solidement participé aux travaux, aux analyses et à l’écriture. En ce qui concerne les remerciements, j’y fait figuré les soutiens financiers, nos techniciens dans certains cas et éventuellement des étudiants si leur contribution est importante.

 

 

4 commentaires

  1. Salut Stéphane et bonne année.
    Je souhaite commenter sur la paragraphe suivante que tu as écrit :
    « Neil a fait ce que de très nombreux jeunes stagiaires font dans les laboratoires : traiter des données, écrire des bouts de programmes, participer à des expériences. Il a donc contribué aux travaux de recherche, comme le font les stagiaires, les techniciens, ingénieurs et l’ensemble du corps administratif en fait. »
    Je ne vois pas où est le problème d’ajouter les noms des stagiaires et techniciens à la liste des auteurs quand ils ont contribué d’une façon nette aux travaux. « traiter des données » et « participer à des expériences » ne sont pas des tâches anodines. Je ne crois pas que l’on peut dire qu’elles sont semblables à toutes les tâches faites par l’ensemble du corps administratif.

    Je partage, cependant, ton inquiétude par rapport aux listes des auteurs qui sont trop souvent manipulées. Mais l’acte d’ajouter le nom d’un technicien ou d’un stagiare qui a vraiment participé à un projet, même s’il ne comprend pas les implications des résultats, ne me semble pas très grave par rapport à un autre abus : l’ajout du nom d’une personne (des fois le chef d’équipe/directeur du laboratoire) à la liste des auteurs quand celle-là a très peu, voire pas du tout, participé à l’obtention des résultats. Heureusement, je n’ai jamais vécu ce genre de manipulation, mais j’ai pu la voir de loin dans d’autres groupes.
    A+

  2. Salut Garret.
    Je te souhaite également une très bonne année 2013.
    Nous sommes en fait d’accord. Un nom doit apparaître dans la liste des auteurs si le travail fournit est conséquent ou à l’origine de la découverte. Un technicien, un ingénieur ou un étudiant peuvent ainsi être mentionnés.
    Il faut donc être capable de juger du niveau du travail et de son impact relatif. Ce n’est pas chose facile. Mais dans le cas de Neil que je relate, j’ai du mal à croire – sauf si on a à faire à un véritable petit génie – que sa contribution soit capitale. J’imagine que l’équipe de son père était déjà entrain d’analyser les données à la manière de Niel avec d’autres outils (en fait Niel à traiter des données pour tester un programme qu’il venait décrire en python).

    Au fait Garrett, quel est l’adresse de ton blog ?

    Amicalement.

  3. Je viens de regarder ton blog.
    Les articles sont intéressants.
    C’est vraiment dommage que tu ais perdu la motivation. J’espère sincèrement qu’elle va revenir. Courage.
    Rassures-toi, j’ai aussi ce problème. Il y a parfois de longues périodes sans billet.

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